Discrimination raciale Cadre de vie
Racisme structurel dans le logement en Belgique
27 janvier 2025
La notion de “race” a été inventée par les savants et scientifiques des 18e et 19e siècles : ceux-ci ont d’abord classé, ensuite hiérarchisé, les groupes humains, notamment en fonction de leur couleur de peau. Selon ce système de pensée, le blanc est biologiquement supérieur au non-blanc, idée qui a largement été mobilisée pour justifier l’entreprise coloniale des pays européens et leur domination sur les pays du Sud. Aujourd’hui, l’existence de races biologiques a été réfutée ; pourtant, le racisme existe toujours. En Belgique, les personnes noires ou arabes sont discriminées pour l’accès à l’emploi [1], au logement, sont victimes de violences policières spécifiquement dirigées contre elles ou doivent subir des propos à caractère raciste dans leur quotidien. Même si les races n’existent pas d’un point de vue biologique, elles continuent pourtant de structurer socialement les expériences [2]. Comment expliquer ce paradoxe ?

Andrew Hernandez - America the Beautiful no. 5
L’explication la plus courante est que le racisme serait une sorte de “peur instinctive de l’autre” qui produirait des préjugés injustifiés, donnant lieu à ces discriminations. Il suffirait alors d’une bonne éducation, de mieux se connaître mutuellement pour lutter contre ce réflexe, déconstruire nos préjugés et faire tomber le racisme. Il s’agit là de la conception du racisme “moral”, phénomène qui serait avant tout individuel. Une théorie plus élaborée de l’analyse du racisme est que celui-ci serait le produit du système économique capitaliste, puisque ce dernier trouve dans les personnes non-blanches une main d’œuvre peu chère et corvéable à merci. L’État belge a de fait organisé le recrutement de travailleurs étrangers entre la fin de la seconde Guerre mondiale et les années 1970, d’abord italiens, ensuite marocains et turcs, pour exercer les métiers ouvriers durs désertés par les Belges [3]. Ces métiers donnaient lieu à de faibles rémunérations pour les immigrés qui les occupaient, et le jeu de la reproduction des inégalités sociales a fait que leurs enfants et petits-enfants ont aujourd’hui encore des ressources inférieures au reste de la population. Selon cette vision, le racisme serait un produit “collatéral” de l’exploitation capitaliste, et il suffirait de se battre tous ensemble - quelle que soit notre couleur de peau - contre les inégalités sociales pour combattre le racisme dans le même temps.
Ces deux visions invisibilisent le fait que le racisme est au fondement de rapports de pouvoir spécifiques entre blancs et non-blancs. Les rapports de pouvoir racistes forment en réalité des rapports sociaux qui créent un système de domination irréductible à d’autres rapports de pouvoir et qui assignent des positions sociales et allouent des ressources inférieures aux personnes non-blanches. Ce sont aujourd’hui des arguments principalement culturels, et beaucoup moins souvent biologiques, qui sont mobilisés pour construire les races et justifier cette domination raciste : le non-blanc aurait notamment des croyances d’un autre temps, notamment religieuses, dont le signe le plus flagrant est qu’il oppresserait les femmes - par exemple par le voile [4] - , justifiant qu’il soit ou “civilisé” ou exclu [5].
Nous proposons d’illustrer la pertinence et l’importance de cette conception du racisme en prenant comme objet la discrimination raciale sur le marché locatif en Belgique.
L’utilisation du concept de “race” ou des catégories blancs / non-blancs dans ce texte peut heurter le lecteur peu coutumier à l’analyse sociologique du racisme. Elles sont en réalité utilisées depuis plusieurs dizaines d’années par les sociologues qui analysent la question, et n’ont bien entendu aucun fondement raciste [6]. Dans la conception courante du mot “race”, celui-ci désigne des catégories humaines supposément inégales sur le plan biologique. Or, nous savons que cette idée est fausse. Néanmoins, comme cela a été dit, nous savons aussi que la société “racialise” les personnes malgré elles. De ce fait, même si les races sont une construction socio-historique injustifiable, elles deviennent réelles socialement : une personne identifiée comme noire ou arabe sera traitée différemment et aura moins de chances dans de nombreuses dimensions de sa vie. Au contraire, une personne blanche sera privilégiée dans de nombreux domaines, sans même en avoir conscience.
Les analystes du racisme ont dû forger des concepts pour faire la différence entre ceux qui sont victimes du racisme (les non-blancs), et ceux qui en bénéficient (les blancs). Ces catégories sont apparues comme indispensables pour comprendre la réalité du racisme : si la vie sociale fait effectivement des différences “raciales”, il faut utiliser des notions qui permettent de rendre visibles ces différences. L’utilisation de ces catégories a malheureusement suscité de nombreuses critiques, affirmant que celles-ci créaient de la division. Cette critique repose sur la conception (erronée) selon laquelle le racisme est un acte moral individuel, et que faire des différences par le langage, ce serait le départ du racisme. Il s’agit d’une vision très peu sociologique : le racisme, ce ne sont pas que des mots, ce sont aussi et surtout des rapports de pouvoir matériels, reposant sur des mécanismes sociaux et institutionnels qui allouent inégalitairement des ressources selon la “race” (construite socialement) des personnes. À notre sens, ne pas avoir les mots pour analyser cette discrimination spécifique, c’est tout simplement s’empêcher de pouvoir dire cette discrimination.
Dans la conception sociologique des catégories raciales, les blancs représentent le pôle dominant dans les rapports sociaux racistes. Celui-ci constitue la référence : les pratiques culturelles, vestimentaires… de ses membres définissent la norme - elles sont évidentes et ne posent pas question (à l’instar du masculin qui l’emporte, dans la symbolique des rapports de genre). A l’autre extrémité, les non-blancs constituent le pôle dominé, dont les membres sont “altérisés” : il s’agit des “minorités ethniques”, des “personnes d’origine immigrée”, des “allochtones” (appelés par ces qualificatifs même lorsqu’ils sont nés en Belgique), dont les pratiques culturelles, les manières de s’habiller, les modes de vie… sont fréquemment considérés comme inférieurs ou regardés avec suspicion. Il faut noter que ces catégories raciales recoupent souvent la couleur de peau (d’où leur nom), mais pas systématiquement. Par exemple, une femme blanche convertie à l’islam et portant le voile peut susciter l’incompréhension de ses proches, de ce fait être “racialisée”, devenir socialement “non-blanche” et subir alors en partie des discriminations racistes [7]. Cet exemple rend évident que les catégories raciales sont des constructions sociales, puisqu’éminemment variables et pas toujours dépendantes des caractéristiques phénotypiques (la couleur de peau) des personnes. Il faut rendre hommage aux chercheurs et militants qui ont produit de riches analyses de la particularité de ces rapports et se sont battus pour démontrer la nécessité de l’autonomie de la lutte antiraciste, les rapports sociaux racistes traversant toute la société [8].
Discrimination raciale sur le marché locatif
En Belgique, 33% des ménages sont locataires de leur logement. Ceux-ci doivent ainsi rentrer en relation avec un propriétaire bailleur, à qui ils louent un logement [9]. Les ménages bailleurs sont 8% en Belgique ; les 63% des ménages restants sont propriétaires d’un seul logement qu’ils occupent. Les propriétaires bailleurs tirent un profit économique du loyer versé par les locataires, leur permettant de s’enrichir grâce à la propriété ; le graphique 1 montre que les propriétaires bailleurs sont généralement plus aisés que les locataires, notamment grâce aux loyers qu’ils reçoivent de ceux-ci [10]. En outre, les locataires sont dans une relation asymétrique vis à vis des propriétaires, puisqu’ils peuvent être obligés d’accepter des conditions de logements peu favorables (loyer trop cher, logement de mauvaise qualité) pour avoir accès à un logement. La relation propriétaire - bailleur est donc un rapport inégalitaire où l’une des parties génère un profit à partir d’un titre de propriété, que l’on peut dès lors qualifier comme ressortant du système des classes sociales.
Mais il faut noter que la relation propriétaire-locataire est également marquée par une dimension raciale. Comme on le voit dans le graphique 2, les propriétaires bailleurs sont plus souvent Belges d’origine belge que les locataires. Ces derniers sont plus souvent Belges d’origine non-européenne ou étrangers issus d’un pays hors-Europe. De ce fait, on peut supposer sans trop prendre de risques que les locataires sont moins souvent blancs que les propriétaires bailleurs à qui ils louent leurs logements.
Cette situation donne ainsi lieu à de possibles discriminations raciales dans l’accès au logement. Le sociologue belge Pieter-Paul Verhaeghe et ses collègues ont réalisé de nombreuses recherches en Belgique pour objectiver la réalité de cette discrimination raciale. Ils ont réalisé des milliers de “tests de discrimination”, qui consistent à répondre en double aux mêmes annonces de logement à louer avec deux profils identiques, mis à part l’origine ethnique : l’un a un nom à consonance belge, l’autre a un nom à consonance arabe (marocain, turc ou syrien) ou d’un pays d’Afrique sub-saharienne (congolais ou ghanéen). Les chercheurs ont alors enregistré auquel des deux profils on ne proposait le plus souvent pas de visite. Cela leur a permis de calculer un taux de discrimination : celui-ci indique dans quelle mesure des profils avec des noms à consonance non-belges sont discriminés par rapport aux profils avec des noms à consonance belge. Par exemple, un taux de discrimination de 20% signifie que le fait que la personnes avec un nom à consonance non belge ne soit pas invité à la visite, alors que c’est le cas pour la personne avec un nom à consonance belge, arrive pour 20 annonce sur 100. Le graphique 3 synthétise les résultats des études réalisées par cette équipe dans les différentes villes/communes de Belgique. Les dates à côté du nom de ces dernières renvoient aux années de publication des rapports issus de ces études, dont la liste est indiquée en fin d’article.
Il apparaît que la discrimination est importante et présente dans toutes les villes de Belgique, sans exception : elle semble bien systématique. La discrimination est importante puisque les taux tournent autour de 20%, soit 1 annonce sur 5 ! Les enquêtes qualitatives révèlent que la discrimination raciale peut être directe et délibérée de la part des propriétaires. Autrement dit, elle peut explicitement porter sur l’identité “raciale” des candidats :
- Intervieweur : Quels sont les critères les plus importants généralement pour les propriétaires ? Excepté cette question de…
- Agence immobilière : C’est le problème de nationalité.
- Intervieweur : Nationalité oui ?
- Agence immobilière : Oui, ça revient régulièrement. Malheureusement. Et pourquoi ? Parce qu’ils ont eu des problèmes avant. Ce n’est pas du racisme, mais il y a une… Des personnes qui vivent autrement que nous et ça pose des problèmes.
(Agence immobilière, Liège. Source : Baromètre de la diversité [11])
Cette discrimination raciale a parfois lieu sous le prétexte de l’appartenance religieuse “problématique” des candidats. Certains propriétaires refusent par exemple de louer leur bien à des musulmans, prétendant que le Ramadan créerait des nuisances aux autres habitants blancs :
- Intervieweur : Et les personnes qui ne veulent pas d’étrangers, c’est pour des questions financières, culturelles ?
- Agence immobilière : Culturelles je crois. Vraiment culturelles. Peut-être aussi financières… […] Je vais prendre des musulmans, qui vont peut-être faire le Ramadan, qui vont faire à manger quand le soleil sera couché à 11 heures du soir et que tous les autres c’est des blanc-bleu belges comme on dit, qui à 11 heures du soir sont au lit parce qu’ils travaillent le lendemain et que ça va peut-être occasionner des nuisances par rapport à ça.
(Agence immobilière, Namur. Source : Baromètre de la diversité)
D’autres propriétaires refusent les femmes voilées, amalgamées à des “extrémistes” potentielles. Ces propriétaires prêtent ainsi une forme d’incivilisation (voire de dangerosité) aux personnes non blanches, montrant que la hiérarchisation culturelle est bien l’un des justificatifs modernes du racisme.
Bien que cette discrimination soit tout à fait illégale, les agences immobilières peuvent jouer le jeu, et se faire le relais des logiques racistes. Lors de leur étude sur les discriminations raciale sur le marché locatif à Bruxelles, l’équipe de Pieter-Paul Verhaeghe s’est fait passer pour des propriétaires désirant mettre leur logement en location auprès d’agences immobilières, en formulant la demande de ne sélectionner que des personnes blanches. Un tiers des agences a répondu positivement à cette demande de discrimination :
C’est possible, mais on ne peut pas l’écrire, ce serait discriminatoire, mais on peut le faire. Je vous décris la personne, nous sommes obligés de prendre toutes les candidatures, mais je vous envoie un petit message ou petit e-mail et vous me dites ‘non’. Cela prend 30 secondes et je dis que le propriétaire ne veut pas car elle a une amie ou qu’il attend de voir toutes les candidatures. On doit seulement pas mentionner qu’il (i.e. le candidat) est ‘noir’. Vous me comprenez ?
(Agence immobilière, Bruxelles. Source : Discrimibru, 2017 [12])
Il faut néanmoins noter que la discrimination raciste est plus élevée lorsque les candidats s’adressent directement aux propriétaires, car les agences se savent soumises à des obligations légales. Les locataires soulignent que la discrimination raciale existe indépendamment du revenu, et que celle-ci peut rendre plus difficilement accessibles les “beaux quartiers” aux non-blancs. Cet élément met en lumière la dimension spécifique du racisme, puisque les personnes non-blanches aisées en sont aussi victimes :
J’ai un ami et il a quatre affaires florissantes. Il gagne beaucoup d’argent. Et pourtant, il ne trouve rien. Cela fait déjà plus d’un an qu’il cherche. Il vit dans un petit appartement ici à Molenbeek, avec sa femme et ses quatre enfants.
(Locataire, Bruxelles. Source : Baromètre de la diversité)
Face à ces discriminations fréquentes, une stratégie des personnes discriminées peut être de dissimuler le fait d’être non-blanc pour obtenir la visite des logements :
Je connais un Marocain qui a demandé à une connaissance belge de prendre un rendez-vous avec ses coordonnées ; travail, femme, enfants, etc. Lorsqu’ils arrivent, le propriétaire prend peur, parce qu’il voit qu’il s’agit d’un Marocain. Il ne l’avait pas entendu au téléphone et ils avaient changé le nom. Ils ont dit qu’ils déposeraient une plainte s’il changeait maintenant d’avis, et il l’a eu.
(Locataire, Anvers. Source : Baromètre de la diversité)
Il est donc un fait peu contestable que le racisme existe sur le marché locatif belge et qu’il n’est pas réductible à des enjeux socio-économiques.
Le contrat racial comme principe d’organisation sociale
Le phénomène de la discrimination raciale sur le marché locatif belge a l’avantage de montrer très explicitement la dimension spécifique du racisme. Si l’on se cantonne à la dimension économique, on est incapable d’expliquer de manière convaincante cette discrimination raciale. Au sens économique, le fait qu’un propriétaire bailleur se coupe des ménages non-blancs (dont le nombre est élevé dans les grandes villes) prêts à lui verser une rente est irrationnel. En effet, au mieux il n’y gagne rien, au pire il perd son temps et de l’argent en refusant des candidats et en postposant la location. La logique qu’il suit est néanmoins tout à fait rationnelle, mais elle est d’une autre nature : il s’agit d’une rationalité raciste qui différencie les blancs des non-blancs. Autrement dit, le raisonnement du bailleur (sa rationalité) intègre comme critère de jugement la dimension raciale, en plus de celle économique, aboutissant à cette discrimination.
Le gagnant de ce jeu n’est pas le propriétaire bailleur, à qui cela ne fournit aucune plus-value économique. Les véritables gagnants sont les locataires blancs qui se voient de fait privilégiés dans la concurrence pour l’accès au logement, les concurrents non-blancs étant éliminés a priori. On comprend alors de quelle manière les rapports sociaux racistes sont transversaux aux rapports de classe : on voit ici qu’ils peuvent traverser des intérêts économiques opposés pour fonder une sorte d’accord tacite entre propriétaires et locataires blancs, lequel comprend une dimension raciale pour favoriser ces derniers. Quand bien même les locataires blancs seraient foncièrement antiracistes, ils bénéficient de ce système, du fait même de leur appartenance raciale. C’est ce que le philosophe jamaïcain Charles W. Mills a appelé le “contrat racial”, système au cœur de nos sociétés à l’histoire coloniale, organisées autour de mécanismes qui relèguent les non-blancs à des places inférieures [13], ici dans l’accès au logement, mais plus largement dans l’accès à l’emploi, à la parole publique, à une représentation politique, etc.
Cette discrimination raciale est systémique : elle structure aussi les actions de l’État, montrant bien qu’elle n’est pas un simple produit des logiques de marché. Dans le domaine du logement, elle semble notamment agissante dans le logement social. En France, plusieurs études ont objectivé le phénomène. En 2022, des chercheurs ont réalisé des milliers de tests de discrimination auprès des 2/3 des guichets d’enregistrement au logement social. L’objet était une demande de renseignement quant à la procédure pour finaliser un dossier de demande de logement social. Il s’est avéré que la candidate supposée française recevait plus souvent des réponses détaillées que celle dont le nom est originaire d’Afrique de l’Ouest [14], qui obtenait plus souvent des informations décourageantes. Des affaires de discriminations raciales dans l’attribution d’un logement social ont également éclaté au grand jour en France, des sociétés HLM limitant l’accès à des logements sociaux à certaines familles non-blanches au prétexte qu’il y avait déjà trop de noirs dans la tour de logements [15]. Nous n’avons pas connaissance de telles études ou situations en Belgique, mais le Baromètre de la diversité dans le logement édité par Unia note tout de même qu’il existe un risque de discrimination ethnique dans le logement social en Belgique, notamment via l’exigence possible de preuves supplémentaires de paiement des loyers antérieurs, de peur que les publics non-blancs soient de “mauvais payeurs” [16].
Il existe ainsi manifestement un communautarisme blanc qui favorise ses propres intérêts, ici dans l’accès au logement, et ce indépendamment de la classe sociale, sur le marché privé mais aussi possiblement dans le logement public (phénomène constaté dans d’autres pays). La reconnaissance de cette situation rencontre généralement de grands blocages parmi les personnes blanches, celles-ci ne se vivant pas comme une catégorie raciale bénéficiant de privilèges. C’est tout le contraire des personnes arabes ou noires, qui font l’expérience fréquente de l’altérité et de la discrimination :
La madame de l’agence m’a dit : “Ecoutez, je vais vous dire quelque chose, mais vous n’avez rien entendu, je ne vous ai rien dit ; le propriétaire, il ne veut pas d’Arabes ni de blacks.” J’ai l’impression qu’on n’est pas traité comme des êtres humains. C’est un peu trop dur d’accepter ça parce que moi je trouve que l’habitation, c’est un droit civique, c’est un droit de tout citoyen, donc on ne demande pas la charité. Je veux payer un loyer et je n’ai pas les mêmes droits que quelqu’un qui s’appelle Jacques ou Sandrine. Ça c’est triste, ça fait très très très mal.
(Jamila, victime de discriminations au logement. Source : interview RTBF [17])
Pourtant, s’il existe des populations noires ou arabes discriminées d’un côté, c’est bien parce qu’il existe des populations blanches qui bénéficient de ces discriminations de l’autre. Dans la concurrence pour l’accès aux ressources, un désavantage pour les groupes discriminés se traduit nécessairement par un avantage pour le groupe dominant. Ces discriminations racistes sont le produit d’un ensemble de mécanismes sociaux qui s’articulent et produisent cet état de fait, dont la logique est irréductible au système des classes sociales. Quand bien même les races biologiques n’existent pas, il semble bien que le racisme fait exister des “races sociales”, créant des inégalités proprement raciales.
Tests de discrimination en Belgique (sources du graphique 3)
- Verhaeghe, P.P., Dincer, E.B. (2024). Discriminatie op de huurwoningmarkt van Leuven : opvolgmeting 2023-2024. Commissioned report by the City of Leuven. [Lien vers l’enquête]
- Verhaeghe, P.P., Dincer, E., Luis Vieira, A. (2023). Sensibiliserende en juridische praktijktesten op de Gentse woningmarkt. Commissioned report by the City of Ghent. [Lien vers l’enquête]
- Dincer, E., Verhaeghe, P.P. (2023). Discriminatie op de huurwoningmarkt van Sint-Niklaas. Commissioned report by the City of Sint-Niklaas. [Lien vers l’enquête]
- Martiniello, B., Ghekiere, A., Verhaeghe, P.P. (2022). Discriminatie op de huurwoningmarkt van Brugge. Commissioned report by the City of Brugge. [Lien vers l’enquête]
- Ghekiere, A., Martiniello, B., Verhaeghe, P.P. (2022). Discriminatie op basis van etnische afkomst en seksuele oriëntatie op de huurwoningmarkt van Kortrijk. Commissioned report by the City of Kortrijk. [Lien vers l’enquête]
- Martiniello, B., Ghekiere, A., Verhaeghe, P.P., (2022). Les discriminations au logement à Namur : Première phase de tests. Commissioned report by the City of Namur. [Lien vers l’enquête]
- Martiniello, B., Ghekiere, A., Verhaeghe, P.P., (2022). Les discriminations au logement à Namur : Deuxième phase de tests. Commissioned report by the City of Namur. [Lien vers l’enquête]
- Bielen, S., Verhaeghe, P.P., Vaes, D., Daniels. L. (2021). Discriminatie op de huurwoningmarkt van de Limburgse mijngemeenten. Commissioned report by the City of Genk. [Lien vers l’enquête]
- Verhaeghe, P.P., Martiniello, B., Ghekiere, A. (2020). Discriminatie door makelaars op de huurwoningmarkt van Antwerpen. Commissioned report by the City of Antwerp. [Lien vers l’enquête]
- Verhaeghe, P.P. (2020). Ethnic discrimination on the housing market of Wallonia : an explorative study. [Lien vers l’enquête]
- Verhaeghe, P.P., Coenen, A., Demart, S. e.a. (2017). Discrimibrux. Discriminatie door vastgoedmakelaars op de private huurwoningmarkt in het Brussels Hoofdstedelijk Gewest. [Lien vers l’enquête]
Notes
[5] L’interdiction du port du voile à l’école, dans les administrations publiques ou les entreprises privées en est un bon exemple : soit ce dispositif oblige les femmes musulmanes à renier une partie de leur identité (au prétexte de leur émancipation), soit il leur empêche l’accès à certaines formations ou à l’emploi si elles refusent. Voir : Sous le foulard, la galère
[6] En France, Colette Guillaumin proposait une analyse sociologique de la construction sociale des “races” dès les année 1970 : https://www.persee.fr/doc/ierii_1764-8319_1972_mon_2_1
[8] Pour une présentation synthétique de la tradition d’analyse des “rapports sociaux de race”, voir : https://shs.hal.science/halshs-02389303/document. Concernant l’analyse des questions urbaines et de logement au prisme des discriminations raciales, voir : https://shs.cairn.info/revue-espaces-et-societes-2014-1-page-249?lang=fr. Ces perspectives d’analyses ont en réalité été développées dans le champ militant par les premiers concernés, avant qu’elles pénètrent dans l’université. Sur la situation française actuelle, voire notamment les écrits et interviews d’Houria Bouteldja : https://www.youtube.com/watch?v=NiXX9gIg6_8.
[9] Il y a aussi des locataires de logement social dont la situation et le rapport avec le bailleur est différent, mais nous n’aborderons pas cette question ici.
[10] Pour plus de détails sur cette question, voir Qui sont les bailleurs en Belgique ?.
[12] https://www.researchgate.net/publication/322698559_Discrimibrux_-_Discriminatie_door_vastgoedmakelaars_op_de_private_huurwoningmarkt_van_het_Brussels_Hoofdstedelijk_Gewest
[14] https://www.fondation-abbe-pierre.fr/sites/default/files/2023-03/Etude_complete_Testing_guichetsDLS.pdf