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Richesses Cadre de vie

Inégalités en matière de facture énergétique

6 octobre 2022 Xavier May

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L’énergie domestique est un bien de première nécessité et constitue un poste d’autant plus important dans le budget des ménages que ceux-ci ont de bas revenus. Les 10 % des ménages les plus pauvres, consacrent 13,2 % de leur revenu à l’énergie domestique contre 3 % pour les 10 % des ménages les plus riches. En outre, ces chiffres minimisent vraisemblablement le poids que représente la facture énergétique pour les ménages pauvres car un grand nombre de ménages à faibles revenus sous-consomment en matière de chauffage : parmi les 10 % des ménages qui ont les revenus les plus bas, 23 % ne sont pas en mesure de chauffer adéquatement leur logement tandis que, dans les 10 % des ménages avec les revenus les plus élevés, seul 0,6 % ne parviennent pas à se chauffer.

Cet article se concentre sur la facture énergétique domestique c’est-à-dire l’énergie nécessaire au chauffage du logement et au fonctionnement des différents appareils électriques des ménages. L’énergie consommée dans les transports n’est donc pas considérée.

Il est difficile de dissocier les différents éléments constitutifs de la facture énergétique des ménages [1], c’est pourquoi la facture énergétique est envisagée dans son ensemble. Pour ce faire, les dépenses en combustibles (gaz, mazout, charbon, bois, etc.) et d’électricité sont additionnées. Généralement, une part importante de la facture énergétique des ménages est consacrée au chauffage.

Différents facteurs ont un impact sur la facture énergétique des ménages : le type de logement (maison 4 façades, maison mitoyenne ou appartement), le nombre de personnes vivant dans le ménage, le nombre de pièces d’habitation, la région de résidence [2] et l’époque de construction. En revanche, le revenu du ménage n’a qu’une très faible influence sur la facture énergétique du ménage [3].

Le graphique ci-dessus illustre que, plus les ménages sont aisés, plus les logements sont grands (ligne bleue) et moins les ménages éprouvent de difficultés à chauffer adéquatement leur logement (ligne jaune). Par contre, hormis pour les ménages du premier décile de revenu, la facture d’énergie par équivalent-adulte est stable du deuxième au dixième décile de revenu [4] (ligne rouge).

Ceci signifie que les ménages pauvres ont une facture par équivalent-adulte qui est souvent comparable à celle des ménages les plus aisés alors qu’ils occupent des logements plus petits et qu’ils se plaignent souvent de ne pas être en mesure de chauffer adéquatement leur logement. Comment ceci est-il possible ? Parce que la qualité des logements varie fortement en fonction de la hauteur des revenus du ménage.

Sur le graphique ci-dessus, on voit que plus les ménages ont de hauts revenus, mieux les logements sont isolés (double vitrage, isolation de la toiture et des murs) et plus fréquemment les ménages vivent dans des logements construits après 1981 qui sont moins énergivores. En effet, c’est après les premiers chocs pétroliers des années 1970 que l’on prend les premières mesures destinées à mieux isoler les logements et que ceux-ci deviennent plus efficaces d’un point de vue énergétique.

Par conséquent, il est erroné de croire que ce sont les ménages aisés qui dépensent davantage d’énergie domestique et qu’augmenter la progressivité des tarifs de l’énergie est une mesure socialement juste. Parmi les ménages qui ont des factures énergétiques élevées, on trouve un grand nombre de ménages riches et de ménages pauvres. Une hausse des tarifs de l’énergie domestique de tous les ménages ou plus spécifiquement des gros consommateurs sera toujours inique et frappera durement les ménages qui ont de faibles revenus.

À l’inverse, une baisse des tarifs de l’énergie, par exemple par le biais d’une baisse du taux de TVA, allégera la facture énergétique des ménages pauvres et libérera une part importante de leur budget pour l’acquisition d’autres biens et services.

Notes

[1Les ménages ne connaissent pas toujours le détail de leurs différentes factures (gaz et électricité) mais connaissent le plus souvent le montant global qu’ils paient en énergie.

[2Il s’agit des 3 régions institutionnelles : Flandre, Wallonie et Bruxelles. Les tarifs du gaz naturel et de l’électricité varient entre les régions ; ils sont plus chers en Wallonie qu’en Flandre et à Bruxelles.

[4L’équivalent-adulte est une échelle d’équivalence qui est appliquée pour adapter les dépenses de consommation en fonction de la taille et de la composition du ménage. Elle permet de comparer les dépenses de consommation de ménages dont la composition est différente.